Un article récent d’Oral Health (en anglais seulement), signé par la Dre Sanjukta Mohanta, membre du comité consultatif du CDSPI, présente les choix difficiles auxquels font face certains dentistes lorsqu’ils envisagent de quitter la pratique clinique. Elle y décrit les défis personnels et professionnels liés à un départ après des années de formation coûteuse et exigeante. Tout en insistant sur l’importance de dialoguer ouvertement, d’explorer d’autres avenues au sein de la profession et d’aborder la décision avec bienveillance, la Dre Mohanta rappelle qu’il faut aussi tenir compte des répercussions financières. Comme pour toute transition majeure, une planification rigoureuse des effets financiers, à court et à long terme, est essentielle.
Nous avons donc consulté Matthew Wright, conseiller en planification des placements au CDSPI Services consultatifs Inc., pour recueillir son avis sur des mesures à la fois stratégiques et réalistes à mettre en place dès maintenant afin de se préparer à un éventuel changement de carrière. Il propose aussi un plan tactique ciblé pour les dentistes qui ont choisi de « divorcer » de la pratique et qui doivent traverser une période de transition sans revenus cliniques.
Pourquoi les finances sont importantes lorsque vous quittez votre cabinet
Quitter la dentisterie clinique n’est pas uniquement une décision émotionnelle : cela entraîne des répercussions majeures sur les flux de trésorerie, les avantages sociaux, la valeur de l’entreprise et l’échéance de remboursement de la dette. Certaines conséquences s’inscrivent dans le long terme, comme l’impact sur la valeur du cabinet, l’épargne-retraite et les stratégies fiscales, tandis que d’autres sont immédiates et influent directement sur les dépenses mensuelles, les besoins en assurance et les sources de revenus temporaires.
En vous préparant financièrement à court et à long terme, vous serez mieux placé pour choisir de rester, de réorienter votre carrière ou de quitter le milieu sans subir une pression financière inutile. Selon Matthew Wright, voici les priorités :
Constituer un fonds d'urgence.
S'assurer d'une protection adéquate de revenus.
Évaluer la valeur du cabinet en fonction de votre intention de départ.
Maintenir un budget à court terme clairement défini.
En somme, une planification financière continue peut contribuer à réduire le risque d’instabilité financière associé à un changement de carrière.
Mesures financières à long terme (à mettre en place dés aujourd'hui)
Que vous choisissiez de rester ou non en dentisterie, voici des mesures stratégiques qui peuvent vous aider à protéger votre avenir financier tout au long de votre carrière.
Constituez un filet de sécurité liquide
Souvent appelé « fonds d’urgence », il devrait contenir des sommes facilement accessibles couvrant au moins 3 à 6 mois de dépenses essentielles. Les comptes d’épargne à haut rendement offrent des fonds rapidement disponibles et à faible risque, tandis que les comptes d’épargne libres d’impôt (CELI) permettent de faire croître vos placements et de les retirer sans imposition. Il peut également être utile de discuter avec un conseiller ou un spécialiste bancaire pour déterminer si une marge de crédit personnelle ou professionnelle destinée aux dentistes pourrait servir de solution temporaire en cas de besoin de liquidités supplémentaires.
Protégez votre revenu grâce à l’assurance invalidité
Si vous subissez une blessure ou une maladie, l’assurance invalidité peut vous fournir un soutien financier pendant votre convalescence ou votre réorientation. Examiner votre police avec un conseiller en assurance qui comprend les particularités de la profession dentaire permet de vérifier que la protection est adaptée à votre réalité (par exemple, la présence de clauses liées à la couverture de votre profession habituelle).
Comprenez la valeur de votre cabinet et vos options de sortie
Si vous êtes propriétaire ou copropriétaire, la vente de votre cabinet peut représenter une source majeure de financement pour votre retraite ou votre transition de carrière. Les méthodes d’évaluation varient, d’où l’importance de consulter un spécialiste en évaluation de cabinet. En pratique, préparer un cabinet à la vente est un processus qui s’étend souvent sur plusieurs années et qu’il vaut mieux ne pas précipiter.
Gérez vos dettes de façon stratégique
Si vous avez contracté des dettes d’études ou liées à votre pratique, vous devrez déterminer s’il est plus avantageux de les rembourser avant un changement de carrière afin de préserver votre flexibilité ou s’il est préférable de conserver des liquidités. Il est fortement recommandé d’analyser ces scénarios avec vos conseillers financiers avant d’ajuster vos modalités de remboursement.
Diversifiez vos sources de revenus
Envisagez des activités génératrices de revenus non cliniques (enseignement, consultation, entrepreneuriat, immobilier, etc.). Ces revenus complémentaires peuvent vous permettre de réduire progressivement vos heures cliniques tout en maintenant vos compétences et vos relations professionnelles.
Planification fiscale et retraite
Consulter des spécialistes financiers qui connaissent bien les réalités des cabinets dentaires peut accélérer votre préparation. Ces derniers peuvent vous aider à distinguer les structures d’entreprise et les finances personnelles, à repérer des occasions de dividendes en capital et à mettre en place des stratégies de retraite efficaces. Les conséquences fiscales liées à la vente d’un cabinet ou au passage à un emploi salarié peuvent être importantes — une planification anticipée est donc essentielle.
Succession et documents juridiques
Si vous avez des associés, prenez le temps de revoir les conventions d’achat-vente et les clauses de succession. Assurez-vous également que vos testaments, procurations et désignations de bénéficiaires sont à jour, afin qu’un changement de carrière ne crée pas de complications inattendues.
Quelques conseils pratiques qui ont fait leurs preuves
Lorsqu’il s’agit de quitter la dentisterie, les départs soudains mènent rarement aux transitions les plus réussies. « Les dentistes les plus résilients avec qui j’ai travaillé n’ont pas quitté du jour au lendemain », explique Matthew Wright. « Ils ont réduit progressivement leurs jours de pratique tout en développant d’autres sources de revenus. Cela leur a permis de maintenir leurs flux de trésorerie et de préserver leurs options. »
Avoir un filet de sécurité financier est tout aussi essentiel. La valeur d’un cabinet dépend souvent de facteurs comme les baux, le financement des équipements ou les coûts liés au personnel. Il est donc judicieux de garder une part de vos fonds personnels séparée des comptes du cabinet. « Si vous êtes propriétaire, commencez à penser comme un futur acheteur, même si vous n’avez pas l’intention de vendre immédiatement », ajoute Matthew Wright. « Une base de patients bien structurée, une comptabilité claire, des protocoles écrits et une organisation précise des rôles du personnel renforcent la valeur du cabinet et en simplifient la vente. »
Les chiffres ne racontent toutefois qu’une partie de l’histoire. Quitter la dentisterie n’est pas seulement une décision financière — c’est aussi un processus émotionnel, parfois chargé de doutes, de culpabilité ou au contraire de soulagement. Il est important de se rappeler que vous n’avez pas à faire ce chemin seul. Demander du soutien peut faire toute la différence entre se sentir isolé et se sentir accompagné.
Où trouver de l'aide
Parlez à vos pairs et à vos mentors.
Comme le rappelle la Dre Mohanta, échanger avec des collègues ayant traversé des questionnements similaires peut être rassurant et vous ouvrir à des options que vous n’aviez pas envisagées. Les cercles d’étude et les programmes de mentorat offrent souvent un cadre sécurisant pour prendre du recul et clarifier vos intentions.
Programme d’aide aux membres.
Si la charge émotionnelle devient difficile à gérer, TELUS Santé met à votre disposition des services de counseling confidentiels, disponibles 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, sans frais.
Conseils professionnels spécialisés.
Des experts financiers et juridiques qui connaissent la réalité des cabinets dentaires peuvent vous accompagner dans les étapes concrètes de la transition — qu’il s’agisse d’évaluer la valeur de votre cabinet, de revoir vos stratégies de remboursement ou de planifier la suite de votre parcours professionnel.
En conclusion
Le message de la Dre Mohanta nous rappelle avec bienveillance que quitter la profession — ou en transformer la pratique — est une décision difficile, mais légitime. En vous assurant d’avoir les bases financières nécessaires pour faire ce choix en confiance, vous vous donnez la liberté de considérer davantage d’options. En protégeant vos revenus, en constituant une réserve personnelle, en comprenant la valeur de votre cabinet et en vous entourant de spécialistes, vous vous placez dans une position qui vous permet d’aborder l’avenir avec assurance et ouverture.
Les renseignements présentés dans cet article sont de nature générale et ne constituent pas des conseils financiers ou de placements personnalisés. Pour des recommandations adaptées à votre situation, veuillez consulter votre conseiller financier.